Les vampires de Verdun

Lorsqu’un jeune homme meurt avant d’avoir vécu les principales étapes d’une vie –fiançailles, mariage, établissement d’une famille, exercice d’un métier– et que cette mort survient dans des circonstances violentes, la frustration de la société s’exprime assez bien par ce vieux dicton de Carinthie: «Qui meurt trop brutalement ne part jamais vraiment». Dans les tranchées de Verdun, en 1917, un aumônier militaire autrichien, inspiré par ce dicton, entraîna tout son pelotton dans une dérive particulière: porté par la hantise de voir les jeunes morts du champ de bataille, transformés en vampires, revenir semer une désolation encore plus désepérante, il aménagea une chapelle épargnée par les bombes en lieu de culte du «Grand Ogre». Le but principal de l’adoration de l’effigie de ce monstrueux démiurge étant de protéger les soldats de la morsure des vampires errant sur le champ de bataille. Survivant à l’hécatombe, l’aumônier revint en Carinthie installer cette représentation du «Grand Ogre» et son culte. Le retour de la paix verra grossir le nombre des membres de cette sombre secte: rancœur des vaincus, crise économique, bouleversements politiques fournirent leurs lots d’insatisfaits désireux de maîtriser «la force de l’Ogre»… Plusieurs d’entr’eux se retrouveront à la brasserie Hofbrau de Munich le 24 février 1920… À la libération du camps d’extermination de Sobibor, le «Grand Ogre» fut retrouvé accroché au mur du QG du général Christian Wirth.

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